Mc 6, 60-69
Sceller l’Alliance dans la chair
Par Pierre ABRY, curé
Depuis quatre dimanches, l’Église nous livre le discours de Jésus sur le Pain de vie. Que Jésus se dise « pain vivant descendu du ciel », ce pain dont nous demandons au Père de nous le donner chaque jour, nous sommes disposés à l’accepter. Mais quand il ajoute que sa chair est nourriture et son sang boisson, aliment de vie éternelle, alors, la raison est poussée dans ses retranchements et la sagesse des sages déconfite. Où sont les 5000 hommes rassasiés lors de la multiplication des pains, quand même « beaucoup de ses disciples se retirèrent, et n’allaient plus avec lui. » « Elle est dure cette parole ! Qui peut l’écouter ? » D’ailleurs, qui restera-t-il lorsque Jésus livrera sa chair à la croix, si ce n’est la Mère qui a donné chair au Verbe en son sein, et Jean, le disciple bien-aimé, qui a contemplé le mystère, reposant sur le cœur de Jésus, pour proclamer : « le Verbe s’est fait chair et a habité parmi nous » ?
C’est à une alliance que le disciple est appelé, à l’image du peuple d’Israël au seuil de la Terre promise : « Choisissez aujourd’hui qui vous voulez servir : les dieux que vos pères servaient au-delà de l’Euphrate ? – Plutôt mourir que d’abandonner le Seigneur pour servir d’autres dieux ! C’est le Seigneur notre Dieu qui nous a fait monter, nous et nos pères, du pays d’Égypte, cette maison d’esclavage ; c’est lui qui, sous nos yeux, a accompli tous ces signes… Nous voulons servir le Seigneur, c’est lui notre Dieu. » Ce peuple de la première Alliance s’était révélé infidèle, lui aussi, au credo professé lors de l’assemblée à Sichem.
Devenir disciple du Christ, pour être ensemble le peuple de l’Alliance au milieu des nations ne saurait se réduire à la profession du credo lors de l’assemblée dominicale, ni à goûter à une satiété, fut-elle spirituelle, lorsque le Seigneur multiplie sa grâce. C’est entrer, comme Paul y exhorte les Corinthiens, dans une relation nuptiale avec le Seigneur Jésus. Comme « l’homme quitte son père et sa mère, s’attache à sa femme, et que tous deux ne font plus qu’un » dans le sacrement du mariage, c’est ne faire qu’une seule chair et un seul esprit avec le Christ. Si le Verbe s’est fait chair, c’est afin qu’unis à lui, nous puissions vivre notre réalité charnelle comme un chemin de sanctification dans et par l’Esprit. Communiant à la chair du Christ ressuscité, que notre chair elle aussi devienne une chair christique, transparente à l’Esprit d’amour.