Mc 12, 38-44
« Tout ce qu’elle avait pour vivre… »
Par le Père Pierre ABRY,
« S’étant assis face au Trésor, Jésus regardait la foule y mettre de la petite monnaie, et beaucoup de riches en mettaient abondamment. Survint une veuve pauvre qui y mit deux piécettes, soit un quart d’as. » C’est un huitième de ce que l’on donnait aux pauvres au Temple pour les nourrir, car de tout temps existait une « Conférence Saint Vincent de Paul » …
Jésus dit à ses disciples : « En vérité, je vous le dis, cette veuve a mis plus que tous. Car tous ont mis de leur superflu, mais elle, de son indigence, a mis tout ce qu’elle possédait, tout ce qu’elle avait pour vivre. » À l’écoute de cette parole, et à compter la quête de ce dimanche, les trésoriers des Conseils de fabrique exultent, heureux de savoir dans notre communauté chrétienne tant de pauvres veuves qui jettent dans le panier toute leur vie… Le curé, pauvre mécréant, émet cependant quelques doutes. Mais peu importe les finances, Dieu connaît le secret des cœurs. C’est à lui de faire l’inventaire, d’évaluer l’actif et le passif et de dresser le bilan au terme de l’existence de chacun de nous.
Non, le Seigneur n’en veut pas à ton argent ! « Je ne prendrai pas un seul taureau de ton domaine, pas un bélier de tes enclos… Le monde et sa richesse m’appartiennent. » (Ps 49, 9.12) La question n’est donc pas ce que tu donnes ou combien tu donnes, mais bien comment tu donnes, avec quoi tu donnes ! Donnes-tu avec le cœur, avec les entrailles, « avec les tripes » comme la pauvre veuve, ou alors, donnes-tu avec calcul, avec le surplus, le superflu ? Et pire encore, pour les plus généreux, donnes-tu pour être vu, sinon des hommes, du moins « du Père qui voit dans le secret et te le revaudra » ?(Mt 6, 4)
Si ton « être » est ton « avoir », alors tu n’auras jamais assez ! Et pour être plus pleinement, il y aura toujours quelque chose à acquérir, à désirer, à envier chez le prochain. Mais si tu entres dans le renversement évangélique, la conversion, pour saisir qu’ « être », c‘est se donner, donner toute sa vie, alors réellement tu seras comblé. « Qui cherchera à épargner sa vie la perdra, et qui la perdra la sauvegardera. » (Lc 17,33) Et cette épargne en pure perte passe aussi par notre compte en banque ! C’est ton cœur aimant que le Seigneur cherche. Celui qui a ce cœur amoureux, « on lui donnera et il aura du surplus, mais celui qui n’a pas (ce cœur amoureux), même ce qu’il a lui sera enlevé » au terme de l’existence. La où est ton trésor, là est ton cœur…