Lc 24, 35-48 Ouvertures pascales Par le Père Pierre ABRY, « Ouvrir en pratiquant l’ouverture au travers », le verbe grec « dianoigô » mérite que l’on tire dessus, comme sur un fil de la « tunique sans couture, tissée d’une seule pièce à partir du haut » (Jn 19,24), le vêtement des Écritures qui à la fois voile et dévoile, revêt et révèle la Parole. Enfant, le Christ fut présenté au temple « selon qu’il est écrit dans la Loi du Seigneur : ‘Tout mâle qui ouvre le sein maternel sera consacré au Seigneur’. » (Lc 2,23) Homme, il a été crucifié, est mort, a été enseveli, est descendu aux entrailles de la terre. Au matin de Pâques, il a ouvert le tombeau, « Premier-né d’entre les morts » (Col 1,18), ouvrant le cosmos et l’humanité entière à sa plénitude. Ce même jour d’éternité, il chemine avec deux désespérés vers Emmaüs. Ce n’est qu’à la fraction du pain que leurs yeux se sont ouverts, pour reconnaître Celui qui en chemin déjà leur avait ouvert les Écritures, les rapprochant des événements survenus les derniers jours. De nuit, en toute hâte, Cléophas et son compagnon retournent à Jérusalem retrouver les Onze et leurs compagnons. Ces deniers font récit de l’apparition à Simon-Pierre et eux rapportent ce qui s’est passé en chemin. Comme dans nos cénacles, lorsque le Christ est évoqué, ses mémoriaux proclamés, la foi confessée, « lui se tient au milieu d’eux et leur dit : Paix à vous ! » A l’inverse d’Emmaüs, il se laisse reconnaître, toucher, et manifeste la réalité de sa présence en mangeant un morceau de poisson grillé, avant « d’ouvrir leur intelligence au ‘rapprochement’ des Écritures. » C’est bien ainsi qu’il convient de traduire « l’intelligence des Écritures ». Christ en est la clé ; il rapproche la Loi de Moïse, les prophètes et les psaumes, les met ensemble, pour y donner à lire l’événement de sa Pâque : « Ainsi est-il écrit que le Christ souffrirait et ressusciterait d’entre les morts le troisième jour, et qu’en son Nom le repentir pour la rémission des péchés serait proclamé à toutes les nations, à commencer par Jérusalem. De cela vous êtes témoins. » « Le vainqueur, le lion de la tribu de Juda, le rejeton de David ouvre le livre et ses sept sceaux. » (Ap 5,5) Le disciple, traitre et renégat, encore aveugle, sourd, muet, au« cœur obtus et lent à croire »expérimente le véritable « Ephphata ! Ouvre-toi ! » (Mc 7,34) Le Ressuscité ouvre ses yeux à sa présence, ses oreilles à l’écoute de la Parole, son cœur à la symphonie des Écritures. Il ouvre ses lèvres pour annoncer l’événement qui l’a saisi de l’intérieur.« Vous serez mes témoins à Jérusalem, et jusqu’à l’extrémité de la terre » (Ac 1,8) saisi par le Christ « le Témoin fidèle, le Premier-né des morts » (Ap 1,5) |