Jn 10, 1-10
Loups dans la Bergerie
Par le Père Pierre Abry,
Être chrétien n’est pas affaire de pédigrée, de « livret de catholicité », de fonctions ou d’état de vie. On entre dans l’Église par la porte du baptême et cette porte est Christ lui-même. On n’y demeure qu’en menant une vie baptismale, en brebis à l’écoute de la voix de l’unique Pasteur, en disciple à l’écoute de la parole du seul Maître. Là, chacun est connu par son nom, tout en appartenant à l’unique bercail. Pierre et André, Jacques et Jean sur les rives du lac de Galilée, Marie-Madeleine dans les bas-fonds d’une vie qui se perdait, ont reconnu cette voix, entendu l’appel par leur nom et se sont mis à la suite de la Parole. Tant de fidèles ont emboîté le pas à travers les siècles, ont cru sans avoir vu.
Le Pasteur fait sortir les brebis qui lui appartiennent. Elles sont en constant exode, elles font Pâque à la suite du Berger qui marche à leur tête. Il est à la fois la Porte à franchir et le Pasteur qui conduit ; il est le Chemin à parcourir et la Vérité à atteindre ; il conduit à la Vie. « Je suis venu pour qu’on ait la vie et qu’on l’ait surabondante. » Christ est la porte et le chemin vers le Père, vers le frère et vers soi-même. Prétendre être chrétien en escaladant par une autre voie, c’est se comporter en brigand et en voleur. « Il en viendra beaucoup sous mon nom, qui diront : C’est moi le Christ, et ils abuseront bien des gens » (Mt 24,5) … « Ils viennent à vous déguisés en brebis, mais au-dedans sont des loups rapaces. » (Mt 7,15)
La situation dramatique que traverse l’Église en Alsace apparaît comme une sorte « d’anti-évangile wokiste ». On prétend agir par amour du Christ, tout en se comportant à l’opposé de ce qu’il commande. L’amour de l’Église se confond avec l’amour de l’image qu’on s’en fait. Dès lors, le Rubicon de l’idéologie est franchi. Au-delà, il n’y a que rivalités, jeux d’influence, lobbying et copinages. Le vice même donne des leçons de vertu.
La parole adressée dans l’Apocalypse à l’Église de Laodicée, l’est aussi à celle de Strasbourg : « Tu t’imagines : me voilà riche, je me suis enrichi et je n’ai besoin de rien ; mais tu ne le vois donc pas : c’est toi qui es malheureux, pitoyable, pauvre, aveugle et nu ! Aussi, suis donc mon conseil : achète chez moi de l’or purifié au feu pour t’enrichir ; des habits blancs pour t’en revêtir et cacher la honte de ta nudité ; un collyre enfin pour t’en oindre les yeux et recouvrer la vue. » La véritable richesse est Christ ; s’en revêtir comme de l’habit blanc du baptême ; acquérir le véritable discernement. « Allons ! Un peu d’ardeur, et repens-toi ! Voici, je me tiens à la porte et je frappe ; si quelqu’un entend ma voix et ouvre la porte, j’entrerai chez lui pour souper, moi près de lui et lui près de moi. » (Ap 3,14-20)