Mt 2, 1-12
Épiphanie du mystère
Par le Père Pierre Abry,
Les mages se seraient-ils mis en quête d’un nouveau-né, si en eux, quelque chose de nouveau n’était pas déjà né ? Auraient-ils cheminé de nuit, guidés par « un astre à son lever », si en eux, la lumière d’une espérance indicible ne s’était déjà levée ? Auraient-ils enduré la fatigue de la route, si en leur cœur, un chemin ne s’était pas déjà ouvert ? Inversement, s’ils n’avaient pas cherché, marché, douté, auraient-ils reconnu dans l’incongruité d’un nouveau-né déposé dans une crèche « le Roi qui vient de naître » ?
Le Fils de Dieu qui se fait fils de l’homme, sa conception dans le sein de la Vierge par la puissance de l’Esprit, sa naissance et sa croissance ne s’abordent pas avec les outils du gynécologue et du pédiatre. On n’aborde pas Dieu tel un objet d’étude qui nous resterait extérieur, on ne le cherche pas comme un objet perdu. Nous sommes en présence du Mystère, réalité cachée en voie de manifestation, en épiphanie. Ce Mystère nous enveloppe de toutes parts, autant qu’il nous saisit de l’intérieur. Il transparaît et affleure en signes extérieurs, et à la fois advient de l’intérieur, plus intime que nous-mêmes. Le Mystère nous cerne et nous concerne. L’intelligence cherche, le cœur se détermine, la personne tout entière se met en chemin, l’histoire personnelle en reçoit une orientation nouvelle, la grande histoire chemine vers son accomplissement et manifeste son sens ultime : l’amour infini de Dieu pour sa création. Dans la figure des mages à la crèche, l’homme qui cherche Dieu et Dieu qui cherche l’homme se rencontrent dans l’adoration, dans l’émerveillement de l’amour. Épiphanie, manifestation de Dieu à l’homme et manifestation de l’homme à lui-même. Dans ce tout petit se manifeste le Plus Grand ; dans ma petitesse, il manifeste ma véritable grandeur, celle d’être aimé à ce point. « Amour et vérité se rencontrent, justice et paix s’embrassent ; du ciel se penchera la justice et la vérité germera de la terre. » (Ps 84, 11)
Nous sommes appelés à un cheminement similaire. La foi qui n’a pas cherché est un héritage traditionnel ; et ce qui ne nous a rien coûté, n’a que peu de prix à nos yeux. La foi qui n’a pas cheminé dans l’intelligence reste un piétisme. La foi qui n’a pas passé par le cœur, lieu de la décision qui met en route, reste une hypothèse de foi, sans impact dans l’existence. Le chemin passe inévitablement aussi par Jérusalem et les Écritures. A partir du 15 janvier, une annonce de l’évangile offrira à ceux qui cherchent, une épiphanie du Mystère. Aujourd’hui encore le Sauveur nous est né, pour naître en nos cœurs. Veux-tu savoir « où est le Roi qui vient de naître » ? Dans la pauvre crèche ecclésiale, où ne manquent ni l’âne, ni le bœuf, pas même le crottin, il se donne encore et toujours…