Jn 3, 16-18
Poids de gloire
Par le Père Pierre ABRY,
Admirable cohérence organique de la liturgie, école de foi et école de vie ! La Pentecôte est l’achèvement du mystère de la Pâque du Christ dans le cœur de ses disciples, faisant naître entre eux, le mystère de l’Église. Le dimanche suivant, la liturgie nous donne de célébrer la Trinité qui en est la source et l’aboutis-sement. Le dimanche du Saint Sacrement qui suivra, indiquera le chemin et le pain de la route.
Lex orandi, lex credendi dit l’adage latin. La règle de la prière est la règle de la foi ; croyons comme nous célébrons. Or, toute célébration s’ouvre « au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit ». « La grâce de notre Seigneur Jésus Christ, l’amour de Dieu le Père et la communion de l’Esprit Saint » sont invoqués sur nous : Grâce d’être des fils dans le Fils Unique, par l’amour du Père, qui nous fait entrer en communion avec lui par l’Esprit. « Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais obtienne la vie éternelle. » Le mystère trinitaire s’ouvre à qui se laisse aimer sans mesure du Père, pour aimer à son tour de cet Amour qu’est l’Esprit Saint, devenant un autre Christ. Notre vie en devient une liturgie à la gloire du Père, par notre vie filiale dans l’Esprit Saint, vivant comme nous célébrons et célébrant comme nous vivons.
« La science enfle, la charité édifie. » (1 Co 8,1) Plus qu’objet de spéculation, la Trinité est vie ; la connaît qui en vit. Aussi, la véritable théologie est doxologie, louange à la gloire de Dieu. « Gloire », de l’hébreux « kabôd », signifie « être lourd », « donner du poids ». Avant même de le donner au monde, le Père se donne totalement en son Fils et se reçoit de lui en sa paternité. Le Fils, dans ce même mouvement de l’Esprit d’amour, se reçoit du Père et se donne à lui filialement. Père et Fils se glorifient mutuellement, chacun donnant son « poids », sa gloire à l’autre. « Père, glorifie ton Fils, afin que ton Fils te glorifie… Je t’ai glorifié sur la terre, maintenant Père, glorifie-moi auprès de toi… » (Jn 17,1-5)
L’amour trinitaire dont nous sommes aimés conduit le Père à donner son Fils au monde, le Fils à se donner dans le monde, l’Esprit à se répandre en nos coeurs, afin que nous vivions de « vie éternelle ». « La gloire de Dieu, c’est l’homme vivant. » (Irénée de Lyon) Menant une vie filiale configurée au Christ par l’Esprit répandu en nos cœurs, nous donnons son « poids de gloire » au Père, et recevons de lui notre véritable consistance, notre poids filial. L’esprit fait de nous « une éternelle offrande à la gloire du Père » qui trouve sa gloire dans l’homme vivant.